Par Marc Godin
Les super-héros au cinéma, mecs en collant qui se posent des problèmes métaphysiques et qui se castagnent avec des mutants très méchants, ça ne marche pas. Et ça me gonfle sévère !
A de rares exceptions près, les films inspirés des comics de la Marvel ou de DC sont des produits de consommation courante, des nanars XXL mal écrits, mal réalisés, avec culturistes en collants flashy qui se bastonnent contre des musclors en slip et des créatures improbables couleur caca d’oie. Des exemples ? Green Lantern, Les 4 Fantastiques, X-Men, Daredevil, The Punisher, Catwoman, Wolverine, Captain America, Hulk, Ant-Men, Suicide Squad, Justice League, Thor, Elektra, Iron Man ou encore les trois Batman de Christopher Nolan.
Je vous entends déjà grommeler : « Mais c’était pas mal les Spider-Man de Sam Raimi et Dark Knight, c’est grandiose ». Le Spider-Man 2 était mineur mais agréablement troussé, et je la trilogie de Christopher Nolan est largement surestimée. Le mec se prend pour Shakespeare, repompe Frank Miller et torche des films pompeux, interminables, du cinéma préfabriqué et bas de plafond. Souvenez-vous du scénario de Dark Knight rises ? Comment Batman réchappe-t-il au feu nucléaire final ? Comment Bruce Wayne, la colonne fracturée par le colosse Bane, au fond d’un trou situé en Inde ou au Moyen-Orient, peut-il se remettre debout puis se faire la belle de la-prison-dont-personnne-ne-s’échappe ? Sérieusement, je doute que Nolan ait tourné avec un script finalisé…
il n’y a qu’à recopier et tu as des chefs-d’œuvre
Le point commun des films de super-héros : la médiocrité. Les producteurs choisissent la plupart du temps des yes men pour mettre en scène, des ringards, des crétins. Des mauvais. Qui se souvient des noms des réalisateurs de Ant-Man, Thor, L’Incroyable Huk, Civil War ou Iron Man 2 ? Et dire que Léos Carax rêve de mettre en scène Daredevil… Ca, ça aurait de la gueule !
Plutôt que miser sur la qualité, un cinéaste avec du métier et une vision, les financiers préfèrent embaucher 12 producteurs et 26 assistants réalisateurs, comme sur Avengers 2. Comme ça, tu es certain d’avoir un blockbuster impersonnel et débile, qui va ratisser le plus large possible, des USA jusqu’en Chine. Tout est sacrifié aux effets spéciaux en images de synthèse, à des scènes de destruction massive, bref le grand vide.
Ce qui est absolument dingue, c’est que le matériau d’origine est la plupart du temps d’une qualité démente : les Fantastic 4 de Stan Lee et Jack Kirby, le Dark Knight de Frank Miller, le Docteur Strange de Steve Ditko, le Wolverine de Mark Millar… Il n’y a qu’à recopier et tu as des chefs-d’œuvre. Et non, d’obscurs scribouillards reprennent à chaque fois le même schéma narratif : un méchant très méchant vole un super objet. Le ou les héros l’affrontent, perd(ent) le premier round, le second, puis gagne(nt) le troisième. Et c’est fini !
Pour que les multinationales comme Sony ou Disney tournent à plein rendement, on évite le sexe, la violence, les répliques vulgos, la subversivité des comics pour séduire les zenfants du monde entier et leur faire acheter des kilotonnes de jeux vidéo, de pyjamas ou de figurines en plastoc. C’est simplement lamentable !
des spectateurs mûrs pour autre chose
Bonne nouvelle, j’ai l’impression que les spectateurs sont mûrs pour passer à autre chose, dégoûtés par des trucs aussi nazes que Justice League 54 ou Thor 435. Pour lutter contre la lassitude du public, Hollywood joue la surenchère comme pour Infinity War qui devrait compter 40 super-héros à l’écran. Mais il y aura-t-il un scénariste derrière cette galère ?
Marvel joue également la carte de la dérision et du second degré comme avec Deadpool où le super-héros se fait sodomiser par sa fiancée avec un gode-ceinture, détourne la caméra quand il va torturer un bad guy, plaisante sur le fist-fucking ou encore balance des vannes, face caméra, comme « Vous voulez savoir à qui j’ai caressé les couilles pour avoir mon propre film ? » Ou l’option adulte, comme avec Logan, hardcore et dépressif (mais avec des messages fondamentaux comme la famille, c’est bath, rien ne vaut un foyer, des enfants, une bonne soirée entre amis avec une bonne bière).
le lecteur est réalisateur
Quand il dévore son comics, le lecteur est le réalisateur, le maître de l’expérience, à la fois le scénariste et le metteur en scène, il peut imaginer ce qui se passe entre deux cases, zoomer, rêver… C’est une des raisons pour laquelle la BD de super-héros ne fonctionne pas au ciné. Tout est lisse, prévisible, prémâché, stupide et bruyant, il n’y a aucune place pour l’ambiguïté, le doute, le hors champ et encore moins… le rêve.
A l’arrivée, il y a très peu de réussites cinématographiques et la plupart du temps, on se retrouve avec des produits débiles, calibrés, dans l’air du temps, qui ne jouent que sur les effets spéciaux en image de synthèse. Des trucs irregardables six mois plus tard… Parmi les rares réussites, des œuvres décalées, à la marge, comme l’épatant Kick-Ass, d’après la somptueuse BD de Mark Millar, ou le formidable Chronicle. Et le chef-d’œuvre du genre, The Watchmen, inspiré d’Alan Moore, un grand film politique, violent, crépusculaire.
Enfin du cinéma !