Par Denis Brusseaux
Un des cinéastes les mieux notés d’internet (5 des 7 films qu’il a tournés figurent dans le top 250 d’IMDB) et les plus rentables au monde (avec les deux Batman et Inception, il dépasse les deux milliards de dollars de recette) est aussi l’un des plus insupportables qui soient issus de la nouvelle génération des auteurs hollywoodiens.
Si l’on peut effectivement parler d’auteur à son sujet, c’est moins pour la portée réelle de son œuvre que pour sa volonté évidente de livrer des produits qui s’élèveraient au-dessus de la masse des blockbusters moyens pour donner au public la satisfaction de se sentir plus intelligent.
Malin, Nolan se sert de procédés « expérimentaux », mais un seul à chaque fois, histoire de ne pas trop compliquer les choses non plus : narration déconstruite (Le Prestige) ou inversée (Memento), jeu avec le réel (Inception), traitement décalé de personnages populaires (Dark Knight)… Le bougre sait tirer parti de cette petits « plus » inhabituels au pays du pop-corn pour créer la surprise et surtout vendre un concept qu’en réalité il trahit en cours de route.
The Prestige s’emmêle les pinceaux à force d’accumuler les sujets au fil du métrage (magie, vengeance, obsession, quête d’identité et progrès scientifique) et s’avère au final inerte, froidement cérébral
Car si l’on y regarde de près, rares sont les films de Nolan à tenir vraiment leur promesse. Les soi-disant tourments intérieurs de Batman dans Dark Knight sont seulement évoqués dans le monologue final, tout ce qui a précédé ne faisant qu’appliquer le cahier des charges de n’importe quelle superproduction boursouflée.
Inception, peut-être le moins onirique des films traitant du monde du rêve, limite son imaginaire à un simple décalquage de Matrix et James Bond, donnant la désagréable impression que Nolan avait un autre film en tête, et n’a pu se décider. Idem pour The Prestige qui s’emmêle les pinceaux à force d’accumuler les sujets au fil du métrage (magie, vengeance, obsession, quête d’identité et progrès scientifique) et s’avère au final inerte, froidement cérébral.
Le plus grave problème de Christopher Nolan tient au fait qu’il est entré en compétition avec lui-même, cherchant à faire « plus fort » à chaque fois. Hélas, n’est pas James Cameron qui veut
Surtout, avec son duel aux rebondissements toujours semblables, The Prestige est emblématique du handicap qui plombe tous les opus de Nolan : une construction terriblement répétitive qui ne fait que ruminer son postulat de départ, pour sombrer dans la gratuité.
Reproche facile à adresser à Memento, mais également évident pour Dark Knight (qui se conclut au bout d’une heure et demi et redémarre presque de zéro) et Inception, dont le ressassement des mêmes images/enjeux à l’infini fait office de sens.
Mais le plus grave problème de Christopher Nolan, qui rend les défauts précédemment cités encore plus rédhibitoires, tient au fait qu’il est entré en compétition avec lui-même, cherchant à faire « plus fort » à chaque fois.
Hélas, n’est pas James Cameron qui veut, et la durée exténuante de ses films, qui se voudraient des fresques, ne fait que souligner la mollesse des scénarios, faits de collages de scènes sans tempo et d’accumulation de sous-intrigues.
Du coup, les incohérences de traitement (dans Dark Knight, aucun des protagonistes principaux ne semble appartenir au même film), la lourdeur ahurissante des démonstrations (l’histoire d’amour d’Inception, le propos anti-sécuritaire de Dark Knight) et la platitude d’une mise en scène purement fonctionnelle, achèvent de faire de Christopher Nolan un génie en toc pour amateurs de bling-bling. Visiblement, ils sont très nombreux.