Six ans après Zero Theorem et deux ans après Downsizing, Christoph Waltz revenait en 2019 à la science-fiction avec Alita : Battel Angel. Le plus germanique des acteurs de Hollywood nous parle films, genres, et… Tarantino.
Propos recueillis par Pierre Blast
Vous avez plus de trente ans de carrière derrière vous. Étiez-vous un comédien ambitieux ?
Très même ! Trop en tout cas pour me contenter d’une vie tranquille. Je n’étais pas obsédé par ma « carrière » – qui n’est absolument pas un mot tabou pour moi – mais je voulais bien faire mon travail. Ce qui revient à collaborer avec des gens de grands talents, innovants, visionnaires. C’est comme ça que je souhaitais par-dessus tout avancer.
Christoph Waltz dans Inglourious Basterds de Quentin tarantino – 2009 © Universal Pictures International France
Votre carrière aurait-elle pu être aussi brillante sans Tarantino ?
Non. Je lui serai toujours reconnaissant de m’avoir choisi. C’était un pari risqué. Je rappelle que tout s’est fait par audition. Il ne savait rien de moi. Mais, par-dessus tout, il m’a fait totalement confiance quant à mon approche du personnage. Ce n’est pas simple pour un auteur de voir quelqu’un d’autre s’emparer de ses créations, de les remodeler à leur image. Pour Quentin, cela ne représentait aucun problème.
Aimeriez-vous tourner à nouveau avec lui ?
Évidemment que je le souhaite. Mais c’est à lui de poser la question.
« Quels que soient les films que j’ai acceptés, Django, Tarzan, Green Hornet, Carnage, je ne l’ai jamais fait par calcul, pour faire avancer ma carrière. »
Robert Rodriguez, qui réalise Alita : Battle Angel, a-t-il une méthode de travail proche de celle de Tarantino ?
Pas du tout. Aucun point commun. Ils sont très amis à la ville, ce sont deux réalisateurs confirmés, réputés, qui ont chacun leur identité, leur univers, mais ils ne forment pas un groupe ni un club. Chacun possède sa propre façon de travailler.
Acteur étranger à Hollywood, il y a toujours un risque à être étiqueté méchant ou séducteur de service…
Je ne me serais pas laissé avoir si facilement. Quels que soient les films que j’ai acceptés, Django, Tarzan, Green Hornet, Carnage, je ne l’ai jamais fait par calcul, pour faire avancer ma carrière. Bien sûr, je ne suis pas à l’abri des clichés. Mais ce que je fuis, c’est avant tout l’ennui. J’aurais horreur de me répéter de films en films.
Christoph Waltz et Rosa Salazar dans Alita : Battle Angel de Robert Rodriguez – 2019 © Twentieth Century Fox
Après trente ans de carrière, votre énergie est-elle intacte ?
C’est vrai que cela devient plus difficile avec le temps. Mais cela rend les choses plus passionnantes encore. Le cinéma évolue. Il ne ressemble plus à ce que j’ai connu à mes débuts. Aujourd’hui, ce sont les singularités qui me font avancer. Le cinéma, dans sa globalité, ne m’intéresse plus tant que ça. Je ne jure plus que par les détails.
Qu’est-ce qui fait donc la singularité d’Alita : Battle Angel ?
Vous pourriez facilement croire qu’Alita est un autre de ces blockbusters comme Hollywood sait les produire. Sûrement… mais pas uniquement. C’est une histoire excessivement riche au niveau des thèmes qu’il aborde. Une aventure futuriste mais qui parle aussi de politique, de résistance, de critique sociale… Avec de telles spécificités, je ne pouvais qu’accepter le rôle.
«Quels que soient les effets numériques, le poids de la technique, le principal reste de raconter une histoire. »
Mais en quoi démarque-t-il de vos films précédents ?
C’est la première fois que la technologie occupe une telle place dans un film auquel je participe. Sincèrement, je me suis posé la question : vais-je y arriver ou pas ? Est-ce que de tels impératifs ne vont pas me brider dans mon travail, me gêner pour jouer ? Et puis, je suis revenu à mes fondamentaux. Quels que soient les effets numériques, le poids de la technique, le principal reste de raconter une histoire. Telle est ma charge, projet intimiste ou grosse production !
Et êtes-vous satisfait du résultat ?
Je pense m’en être pas mal sorti. Le défi était de taille pourtant. Si jamais j’avais senti que la technologie me gênait, qu’elle devenait trop contraignante, je n’aurais eu qu’à en vouloir à moi-même. Ce sont mes capacités d’acteur qui ont été mises à l’épreuve.
Christoph Waltz dans Zero Theorem de terry Gillian – 2014 © Concorde Filmverleih GmbHStars
Les acteurs ne risquent-ils pas d’être remplacé un jour par des personnages de synthèse ?
Probablement. Mais ça ne me dérangera pas. Moi, je ne serai plus là depuis longtemps. Ils le feront s’ils le peuvent et que cela arrange leurs affaires.
« Mon intérêt pour la science-fiction vient qu’il exprime clairement les angoisses de notre époque. »
Alita : Battle Angel, Theorem Zero, Downsizing… Vous semblez apprécier le genre SF…
J’aime varier les plaisirs. Mais mon intérêt pour la science-fiction vient qu’il exprime clairement les angoisses de notre époque. Bien plus que d’anticiper pour nous ce que sera l’avenir de l’humanité.
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