Lambert Wilson : « Je n’aime pas vraiment être le centre d’intérêt. »

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See Mag a rencontré Eric Besnard et Lambert Wilson pour Les Choses Simples (sortie le 22 février). Cette comédie voit la rencontre de deux personnages que tout oppose : un entrepreneur égocentrique et un scientifique misanthrope, retiré du monde. Les Choses Simples fonctionne parfaitement grâce aux dialogues, comédiens, superbes décors naturels, et à une sincérité qui fait du bien. Entretien avec un grand comédien et un cinéaste qui signe son meilleur film. 

Entretien par Grégory Marouzé

Lambert Wilson, qu’est-ce qui vous a séduit dans le projet et votre personnage ?
Lambert Wilson : Avant tout, c’est la modernité du sujet. C’est-à-dire la question qui est posée au public, et qui se pose à moi aussi : qu’est-ce qu’on fait de notre temps ?  Cette vie moderne nous apporte-t-elle du sens et du bonheur ? Qu’est-ce qu’on peut proposer comme alternative au fait qu’on devienne des machines dirigées par des machines ? C’est quelque chose qui est dans mes préoccupations tout le temps !

Donc là, il y a ce sujet proposé par Éric Besnard. Ensuite, de façon égoïste, en tant qu’acteur, je cherche toujours les rôles où les histoires vont proposer un maximum de situations de jeu pur. Le jeu, qu’est-ce que c’est ? Les musiciens jouent de la musique, nous on joue de la comédie ou du drame. C’est ça notre interprétation, notre miel. Donc, c’est un rôle absolument extraordinaire qui traverse plein de situations dramatiques, comiques et aussi de masques, de couches.

Puis, j’aimais beaucoup l’idée du duo. Le duo, je l’ai déjà notamment vécu avec Fabrice Luchini dans Alceste à bicyclette. Mais là, il se trouve que je suis très fan (dans le côté cinéphile) de Grégory Gadebois. Être à côté de lui, j’en rêvais ! J’ai dit plusieurs fois que je voulais travailler avec lui. C’est le meilleur acteur de sa génération, presque le meilleur acteur français pour moi ! L’acteur avec lequel j’aurais aimé travailler dans le passé, c’est Gérard Depardieu ! J’aurais aimé être face à lui. J’avais la même envie avec Grégory. On pouvait être complémentaires. Une chimie pouvait se passer entre nous.

Eric, vous aviez déjà travaillé avec Grégory Gadebois. Cela n’avait pas encore été le cas avec Lambert Wilson.
Eric Besnard : L’envie de travailler avec Lambert existait puisqu’on a eu un projet, il y a 20 ans, qui ne s’est pas fait. Mais Lambert devait jouer le rôle principal du film. Ce n’est pas parce que tu as dit non. C’est parce qu’on n’a pas trouvé l’argent pour le faire !

Lambert Wilson : Mais j’avais dit oui. Je n’étais pas assez bankable, voilà.

Eric Besnard : Et entre-temps, Lambert a interprété des personnages dans des films que j’avais écrits. Quand un acteur joue votre texte, vous avez un point de vue sur l’acteur qui n’est pas le même que quand vous le regardez de loin. Quand vous avez déjà filmé un acteur, vous pouvez vous permettre de lui dire de venir 5 jours, pour trois scènes magnifiques. Quand vous ne l’avez pas fait, c’est plus délicat, en tout cas pour ma part, comme scénariste, c’est plus délicat. Donc, j’attendais d’avoir le bon rôle pour lui proposer.

Et là, c’est vrai qu’en antinomie de Greg… parce que j’ai écrit pour Grégory très clairement … ça fait partie de mes motivations de départ, j’avais besoin d’un personnage qui soit graphiquement et en termes d’élégance, de mouvement, de volubile, de séduction, l’antithèse de Grégory. Et comme j’avais besoin d’un personnage qui joue un acteur qui, parfois, se ridiculise, soit un maître en séduction, il n’y a pas grand monde. Donc très vite, le nom de Lambert est arrivé et je vais plus loin : j’ai écrit ce personnage pour le proposer à Lambert. Dans un premier script, ce n’était pas tout à fait le même personnage. J’ai réécrit le personnage, j’ai inventé le personnage de Vincent Delcourt pour le proposer à Lambert.

« Mais je voulais qu’il ait la tête de Sean Connery. Il fallait avoir les cheveux blancs, une barbe blanche. Ce n’est pas obligatoirement ce qu’un acteur a envie d’avoir. Ça a l’air de vieillir l’acteur. »

Dans le dialogue, il est dit de votre personnage, Vincent Delcourt, qu’il a été élu l’entrepreneur européen le plus sexy. C’est vrai que vous êtes sexy dans le film…
Lambert Wilson : Je ne peux pas faire de commentaires sur ça, c’est très dangereux. Je ne peux pas être objectif. Et d’ailleurs ce n’est pas moi, enfin pas mon personnage, qui le dit de lui-même. Enfin, c’est vrai qu’il s’en vante un peu.

Eric Besnard : Je vais vous dire quelque chose : je l’ai dit à Lambert mais sans le dire aussi clairement quand j’ai eu l’idée de lui proposer ce film. Je me suis souvenu qu’il y a très longtemps, j’avais été critique de cinéma. J’avais vu Cinq jours ce printemps-là de Fred Zinnemann, dans lequel Lambert jouait avec Sean Connery. Et je me suis dit que j’allais lui proposer d’avoir la tête de Sean Connery pour jouer Vincent Delcourt.

Je ne lui ai pas dit comme ça, parce qu’il m’aurait dit non. Mais je voulais qu’il ait la tête de Sean Connery. Il fallait avoir les cheveux blancs, une barbe blanche. Ce n’est pas obligatoirement ce qu’un acteur a envie d’avoir. Ça a l’air de vieillir l’acteur. Mais on s’en fiche de l’allure. L’important, c’est l’élégance que ça génère. Voilà et c’est ce qu’on a créé avec ce personnage.

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Lambert, vous avez envie de jouer avec Grégory Dubois. Eric, vous proposez ces deux rôles à Lambert et Grégory. C’est quand même un peu casse-gueule parce que face à vous, vous avez deux Rolls. Quand on a une partition comme celle-là, à leur donner, il faut faire attention à ce que l’une ne soit pas déséquilibrée par rapport à l’autre. Et que le duo fonctionne…
Eric Besnard : Alors j’ai envie de vous répondre deux choses. La première, c’est que plus les acteurs ont de talent, moins ils vous embêtent. Ceux qui vous embêtent sont rarement ceux qui en ont le plus. Ils peuvent être très connus mais ça ne veut pas dire qu’ils aient énormément de talent. Ça, c’est la première chose.

La deuxième chose, c’est que quand vous avez deux acteurs aussi différents que Lambert Wilson et Grégory Gadebois, ils ne sont pas en concurrence. C’est le principe du film. Quand vous avez deux acteurs qui ne sont pas en concurrence à l’image, vous êtes tranquille. S’ils sont sur le même registre, là il y a un problème, s’ils se tirent la couverture, s’ils se combattent. Moi, je rêvais de travailler avec Grégory Gadebois.

« Gadebois est beaucoup plus mutique dans la vie. Il est beaucoup moins expansif. Mais Lambert a tourné autour, dans la vie comme dans le film, pour le séduire, et c’était très joli parce que c’était une mise en abyme du propos du film. »

Gadebois est beaucoup plus mutique dans la vie. Il est beaucoup moins expansif. Mais Lambert a tourné autour, dans la vie comme dans le film, pour le séduire, et c’était très joli parce que c’était une mise en abyme du propos du film. Dans le film, Lambert a 70% des répliques. En revanche, les silences valent largement autant que les paroles. Un acteur qui écoute, c’est magnifique.

Donc l’équilibre entre les deux fait qu’à la fin c’est un peu comme dans Laurel et Hardy. Il y en a qu’un qui parle, mais on se souvient des deux.  Donc, ce n’est pas une question de nombre de mots. C’est une question d’équilibre, d’amour partagé, et de montage. Le film est construit sur deux personnages, donc je ne vais pas tout déséquilibrer. J’ai déjà vu des acteurs essayer de tirer la couverture à eux. Là, ce n’était vraiment pas le cas.

Lambert Wilson : Ce n’est pas venu comme une surprise. C’est vrai qu’à la première rencontre, on peut découvrir quelque chose qu’on n’attendait pas. Mais si j’ai aussi été attiré par Grégory comme acteur, c’est que j’ai pressenti cette générosité. Là où il plaçait son métier. On sent quand il joue qu’il n’est pas là pour tirer la couverture à lui. Il est très généreux et on pressent dans son regard la bonne personne, entre guillemets, qu’il est. J’ai eu cette confirmation au premier jour.

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Ça commence à l’habillage, avec la courtoisie. La façon d’incorporer l’autre tout de suite et de l’observer. Il y a une bienveillance. Je crois que c’était une confirmation de ce que j’avais pressenti ça à l’écran. Alors qu’avec des très bons acteurs, on peut pressentir un égocentrisme, on peut même ressentir de la méchanceté. Et puis après, les gens sont aussi précédés d’une réputation. Grégory est précédé d’une réputation de gentillesse et de bienveillance. Ça se sait.

Eric, vous écrivez et réalisez souvent pour deux personnages. A chaque fois, on a l’impression que vous êtes proches des personnages, avec un sujet intime, alors que vous faîtes des films populaires…
Eric Besnard : Oui, mais pour une raison assez simple, c’est que je gagne ma vie comme scénariste pour les autres, donc si je fais un film, il faut qu’il y ait une résonance particulière. J’adore écrire un film d’action pour les Américains, un film d’auteur pour quelqu’un dont c’est le premier film, etc. Tous les genres m’intéressent. J’ai une cinéphilie large mais, avec le temps, je deviens de plus en plus exigeant sur ce que je vais faire.

C’est pour ça que mes premiers films étaient des films de genre, et que j’ai abandonné ça pour me rapprocher de ce qui m’importe. De film en film, de plus en plus, j’essaie de dire ce qui m’importe. Mais pas en le disant sous forme de cours parce que, comme mon moyen d’expression c’est le cinéma, j’essaie de rester avant tout dans un divertissement au sens premier du terme, voire dans la comédie, pour toucher le maximum de personnes. Mais il faut qu’il y ait une résonance particulière aux propos et qu’en effet, je me retrouve dans le film.

C’est quoi le déclic alors pour Les Choses simples ?
Eric Besnard : Le déclic, c’est le COVID. C’est le confinement. Je descends, je veux acheter du pain, il y a une dame au bout de la rue et elle change de trottoir. Comme si j’étais pestiféré. Je ne la connais pas, elle ne me connaît pas, je remonte chez moi et je réfléchis. J’appelle les producteurs pour qui j’étais en train d’écrire un autre film et je leur dis de me laisser un mois, il faut que je réponde à ce que je viens de vivre.

Je me dis, voilà ce qu’on fait de son temps de vie, ce n’est pas possible qu’on ait peur, ce n’est pas possible de vivre dans un monde aussi compliqué. Qui nous déborde. Donc, je vais mettre les deux aspirations de chacun de nous face à face. A savoir les deux personnages que vous voyez dans le film mais que nous sommes tous. Nous sommes tous ces deux personnages-là à la fois.

« Dans Délicieux, mon dernier film, il y a d’autres personnages. Mais c’est avant tout la rencontre des personnages d’Isabelle Carré et de Grégory Gadebois »

Celui qui essaie d’être dynamique, compétent, compétitif dans son époque et celui qui fait un pas de côté, qui est contemplatif, qui ne veut pas qu’on l’ennuie et qui essaie de récupérer la barre sur sa vie. Tout en sachant, et c’était l’autre chose importante pour moi dans le film, que tout le monde se ment. Ce n’est pas le rat des villes, le rat des champs. Les personnages sont plus compliqués qu’ils n’en ont l’air.

Ça n’a de sens que si que si vous êtes capable de vous rappeler qui vous êtes, d’assumer vos fragilités et de les dire à l’autre. En effet, de plus en plus, j’ai envie de faire des films à deux personnages. Ça ne veut pas dire qu’il n’y a que deux personnages. Dans Délicieux, mon dernier film, il y a d’autres personnages. Mais c’est avant tout la rencontre des personnages d’Isabelle Carré et de Grégory Gadebois.

Et c’était le cas du Goût des merveilles. Vous avez raison et j’aime cette idée-là. Et puis en plus, comme l’a dit Lambert, c’est un espace de jeu magnifique. Moins vous avez de personnages, plus vous passez de temps avec les acteurs, et plus on développe un travail et un arc intéressants sur les personnages.

Donc, ce n’est pas que je n’ai pas envie de faire des films avec plein de gens, c’est que ça permet de dire des choses. Parce que vous créez une empathie avec le personnage. S’il est là longtemps, vous pouvez le présenter comme le personnage de Lambert un peu antipathique au début, et découvrir que derrière ça, il y a autre chose. Puis, il va générer une empathie et au moment où il va dire quelque chose, il va vous intéresser parce que vous aurez fait le chemin avec lui.

Dès le départ, si le personnage de Lambert Wilson paraît antipathique, paradoxalement il nous apparaît sympathique. On comprend par les attitudes, par les regards, que Lambert incarne un personnage qui n’est pas totalement celui que l’on croit.
Eric Besnard : Je pense que Lambert n’en avait pas besoin, mais en dehors de notre première rencontre, je lui ai dit « est-ce que tu pourrais revoir La Dame du vendredi de Howard Hawks ? » Rappelez-vous de Cary Grant dans ce film. Il est vraiment antipathique au fond, mais il a beau mal se comporter, il est incroyablement empathique. Et progressivement, il l’est de plus en plus.

Lambert Wilson : Ce que vous décrivez me fait penser à la partie la plus troublante et intéressante à interpréter dans mon personnage. Vincent Delcourt est fasciné par les acteurs, le fait de jouer. Il aurait pu être acteur lui-même, alors il va se servir de ses talents dans la vie. Et puis, il y a parfois des moments où il ne sait pas lui-même, il ne sait plus lui-même s’il joue ou pas.

Et là, il y a une sorte de zone grise qui était très intéressante à jouer. A un moment donné, il est dans un entre-deux où il ne sait même plus lui-même s’il joue la comédie ou pas. Et ça, c’est très intéressant à jouer. Ah ouais, ça c’était la partie la plus stimulante parce que je n’avais jamais fait d’exploration sur ce thème, qu’on trouve beaucoup dans le théâtre, de personnages qui mettent des masques et qui ne savent plus eux-mêmes s’ils ont un masque ou pas.

« Je n’aime pas vraiment être le centre d’intérêt. Je fuis les groupes. Je n’aime pas faire montre de mes talents d’acteur du tout. J’en suis absolument incapable. »

Vincent Delcourt est un homme si médiatique, que tout le monde pense le connaître. S’appartient-il encore ? On pense à une mise en abyme du travail des comédiens. Le comédien appartient au public…
Lambert Wilson : Alors la différence entre moi et le personnage, c’est que contrairement aux apparences, je ne suis pas acteur. Même si c’est mon métier. Je suis fils d’un acteur1 qui, comme le personnage de Vincent, adorait être le centre de l’attention, pouvait imiter absolument n’importe quelle personne qu’il venait de croiser dans la rue et qui se mettait toujours au centre, dans la lumière.

Et curieusement, pour moi, c’est un job, mais dans la vie, je ne suis pas comme ça. Je n’aime pas vraiment être le centre d’intérêt. Je fuis les groupes. Je n’aime pas faire montre de mes talents d’acteur du tout. J’en suis absolument incapable. C’est comme une activité qui me demande un effort. Alors dans ce sens-là, je suis très éloigné du personnage. Là où je me rapproche de lui, c’est dans la suractivité, le fait de ne pas tenir en place, d’être incapable d’arriver à un état contemplatif.

Même dans tout ce qui vous prépare à la contemplation et à l’observation tranquille. Je vais tout de suite chercher quelque chose à brandir, amasser du bois pour faire du feu ou ceci ou cela, etc… Je ne serai jamais contemplatif.

Avez-vous l’impression d’avoir pu incarner quelque chose que vous n’aviez pu travailler auparavant ?
Lambert Wilson : Alors ça, c’est ce que j’essaie de faire à chaque fois ! Franchement, la répétition, pour moi, c’est la mort absolue ! Donc, je dis oui à des propositions qui me permettent de faire une investigation sur quelque chose que je n’ai pas travaillé auparavant. Ça, c’est fondamental pour moi, c’est la condition, c’est presque plus important que la qualité du rôle ! Proposer au public un nouveau personnage et à moi-même un sujet de réflexion et de travail. Je prends une analogie avec les musiciens.

Si on joue uniquement trois sonates de Brahms, on devient dingue, puis surtout on ennuie tout le monde, donc c’est la moindre des choses pour moi. C’est vrai, j’ai déjà joué des chefs d’entreprise.  J’ai fait des personnages dynamiques. Je n’ai pas trop envie de définir ce personnage dans ma réponse pour ne pas donner trop de clés aux gens qui vous liront. Les facettes de ce personnage-là, ses particularités, je n’avais pas fait. Et puis, cet arc est très particulier, cette espèce de lâcher prise, la transformation, même physique du personnage…

Et puis, le film traite de thèmes qui m’intéressent énormément. Ce sont des thèmes qui sont dans l’air du temps : le changement de paradigme, renoncer à une vie imbécile qui ne vous rend pas heureux. Curieusement, les trois derniers films que j’ai faits sont dans cette lignée-là, avec des personnages différents, mais avec des changements de vie, au contact d’un autre personnage ou d’un environnement. Alors maintenant ce qu’il va falloir, c’est que je ne me répète pas dans ces sujets-là, parce que ce sont des sujets qui m’intéressent énormément, parce que j’aspire à ça aussi dans ma vie. C’est pour ça que le sujet me plaisait, parce que ce sont des questions qui me traversent, bien sûr.

Le film est-il proche de celui que vous aviez en tête ?
Eric Besnard : Je vais avoir deux types de réponses. La première c’est que je n’avais pas prévu de faire ce film. C’est né d’un incident dans la rue et un mois plus tard, j’avais un scénario. Donc, c’est vraiment un film de réaction. De ce point de vue-là, c’est un film politique au sens premier du terme, c’est-à-dire que c’est un film de résistance. Je ne vais pas vivre dans ce monde-là, je ne vais pas vivre dans un monde où les gens ont peur les uns des autres.

Il n’est pas pensé au départ en disant je vais réaliser un film sur ceci ou cela. J’ai été très surpris quand j’ai vu le scénario terminé parce que c’est allé très vite et que je ne savais pas où j’allais d’une certaine manière. Je ne sais pas si c’est rassurant (rires), mais maintenant ce qui me fait plaisir, c’est que ce que j’entends dans les salles à la fin (on est en train de faire une tournée). Ce sont les mots que j’espérais. En gros, c’est assez proche de ce que j’entendais sur Le Goût des merveilles. En fait, on est à peu près au même endroit. Sur un rapport à la vie, sur l’émerveillement, la nécessité de l’émerveillement, sur l’utilisation de son temps de vie, sur le fait de réfléchir à reprendre en main sa propre vie, à ne pas se laisser écraser par des choses qu’on ne choisit pas.

Et puis il y a des gens qui semblent, non pas passer un bon moment, mais vous remercient quasiment que cette petite bulle existe, que ce petit moment existe. A partir du moment où vous dites “choisissez vos moments, toutes les secondes ne se valent pas, il faut dilater les moments, les moments d’exception”, que quelqu’un va avoir votre film et vous dit « j’ai passé un moment qui correspond à ce que j’aspire », vous vous dites que vous avez servi ce que vous vouliez faire.

J’en suis le premier étonné parce que le processus de production d’un film est un processus de déperdition permanent et de plein d’accidents. Mais je crois que ça ressemble à ce que je voulais faire. Ce n’est pas le film qui me le dit, ce sont les échos que je reçois. Au début, j’en ai été surpris et aujourd’hui je commence à m’y faire en me disant que tout ça n’est peut-être pas raté.

1 Georges Wilson

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