Par Marc Godin

Deux éducateurs se battent pour la réinsertion d’autistes. Le duo Toledano/Nakache accumule clichés et bons sentiments, et ne parvient même pas à traiter correctement du handicap.

« Un film nécessaire »

C’est écrit sur l’affiche, en gros, ça s’affiche dans la presse.

Du wording, des éléments de langage, du marketing.

Nécessaire pour qui, pour quoi ?

De fait, dès l’affiche, on voudrait te faire croire que le nouveau film du duo Toledano/Nakache signifie quelque chose, va développer une pensée différente, originale, sur la vie, le handicap, l’amitié, toussa. Un peu comme Intouchables qui balançait des trucs comme le handicap, c’est pas cool, l’art contemporain = caca ou encore Samba qui allait encore plus loin dans l’analyse nietzschéenne du monde moderne, affirmant que le racisme, c’est mal et les sans-papiers sont gentils.

Pour leur nouveau feel good movie, Tolenakache s’attaque à l’autisme. Mais il traite le sujet par la bande (par-dessus la jambe ?) en collant aux basques de deux éducateurs, Vincent Cassel et Reda Kateb, héros supers du quotidien, issus du milieu associatif, qui se défoncent pour aider des ados autistes dont personne ne veut s’occuper dans les centres de soins traditionnels.

Super bonus, les autistes sont eux-mêmes encadrés par ados de banlieue en réinsertion. Pendant deux plombes, Tolenakache décline les mêmes scènes : Cassel, le juif, et Kateb, le musulman, doivent trouver une solution d’urgence pour un môme  violent/sympa/mutique : une place dans un foyer, un job, un hébergement pour la nuit…

Comme on est dans une comédie, il y a un running gag. Cassel le bogoss étant super occupé par son job, ce célibataire incasable n’a pas le temps de draguer et donc il se coltine des blind dates qui foirent lamentablement. Qu’est-ce qu’on se marre…

Quel regard ?

Nakachalo est un petit malin qui sait exploiter son fonds de commerce démago-dégueulasse, le « feel good movie » avec des vrais bouts de sociétal dedans. En gros, le tandem a repompé la « structure » d’Intouchables et sa « philosophie » (on kiffe le vivre ensemble salvateur), mais puissance deux. Au lieu d’avoir un gentil héros du quotidien, incarné par une star, qui pouponne-materne-vanne un handicapé, également interprété par une autre star, nous avons cette fois DEUX stars qui encadrent plein de vrais handicapés top sympas.

Dans leurs interviews, les cinéastes déclarent sérieusement qu’ils veulent changer le regard sur l’autisme. Mais quel regard ? L’autisme n’est même pas traité dans le film. On a bien un autiste rigolo qui tire le signal d’alarme dans le métro, mais Nakachalo n’a d’yeux que pour Cassel et Kateb qui sont vraiment époustouflants et qui récoltent les plus belles scènes, les meilleures vannes.

D’ailleurs, à la fin, on ne se rappelle que des têtes d’affiche et absolument pas des autistes qui font de la figuration. Du « cinéma » lisse et calibré, pensé pour remplir les tiroirs-caisses de la Gaumont.

Clichés et bons sentiments

Héros de la comédie sociétale engagée, tendance En marche (arrière), Toledano & Nakache font une nouvelle fois entendre leur petite musique mesquine. Ils pensent réinventer l’eau tiède, mais ne font qu’accumuler les clichés et les bons sentiments pour masquer le vide narratif. Pour la suite, on a envie de leur donner le conseil de Louis B. Mayer, patron de la MGM dans les années 30, qui déclarait « Quand je veux faire passer un message, je vais à la poste… »

Un petit mot sur la forme en guise de conclusion. Il n’y a pas un plan de cinéma dans Hors normes, pas une image iconique, pas une image correctement éclairée, pas un hors champ signifiant, juste l’acteur principal au milieu du cadre. A côté, un épisode de Derrick, c’est Lawrence d’Arabie et Joséphine, ange gardien, c’est du Kubrick.

A fuir…

Sortie : 23 octobre 2019 – Durée : 1h55 – Réal. : Eric Toledano et Olivier Nacache – Avec : Reda Kateb, Vincent Cassel, Hélène Vincent… – Genre : comédie – Nationalité : Française.

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