Nope
Alors qu’OJ et Emerald héritent du ranch familial, ils aperçoivent un objet volant mystérieux au-dessus de celui-ci. Ils décident alors d’en capturer un maximum d’images. Jordan Peele bouscule les codes du genre, mélange western et fantastique et s’offre une critique métaphorique de l’industrie cinématographique et de la société du spectacle.
Par Colonel Dawa
Après le très réussi Get Out en 2017 et le très contesté US en 2019, Jordan Peele, également auteur de la série Lovecraft Country sur OCS, déboule à nouveau dans les salles avec Nope, son meilleur film, un blockbuster atypique, déroutant mais saisissant tant sur plan formel que par sa narration.
L’ombre de Spielberg
« Rencontre du 3e type m’a beaucoup marqué par son ampleur et sa vision mais, surtout, grâce à la capacité de Steven Spielberg à nous faire croire qu’on est vraiment en présence d’un phénomène qui vient d’ailleurs. » Ainsi s’exprime Peele quand il évoque son inspiration pour la genèse et la réalisation de Nope qui était initialement baptisé Les petits hommes verts.
Et d’enchaîner par : « Dans ce genre, cependant, on prête souvent d’innombrables qualités extraordinaires à une civilisation extraterrestre très évoluée. Mais si la réalité était bien plus simple et sombre que tout ce qu’on peut vraiment imaginer ? ».
Il est évident qu’après deux œuvres à l’ambition sociale et sociétale, Get out et US, Peele a voulu réaliser avec Nope : « Un grand film d’extraterrestre, un film sur des soucoupes volantes, et pas seulement un film d’horreur à base de soucoupes volantes mais vraiment l’essence même de ce sous-genre-là. C’est un genre difficile à bien mettre en œuvre, car il faut voir très grand… », selon ses propos.
Et si effectivement, le cinéaste a vu grand, il a toutefois réalisé une œuvre qu’on pourrait quasiment qualifier de huis clos étouffant bien que plus de la moitié du film se déroule en plein air autour du ranch familial californien.
Plusieurs niveaux de lecture
Mais plus qu’un huis clos classique et terrifiant, Jordan Peele ajoute des niveaux de lecture à sa narration et construit à travers son histoire horrifique, une métaphore d’une industrie hollywoodienne ogresse et complice d’un public – nous -, totalement décomplexé, au voyeurisme assumé avec pour prime, un rapport à l’image totalement déformé, merci les réseaux sociaux. Peele avoue donc à demi-mot, que la puissance de l’image peut être destructrice et donne un pouvoir inestimable à celui qui sait la maîtriser. Une mise en abîme ?
Peele, qui d’autre part, n’hésite jamais à mettre en valeur la communauté afro américaine dans ses œuvres, avec notamment la trame « White supremacy » de Get Out, n’oublie pas cette facette de son fond de commerce.
En effet, en présentant ses héros OJ et Emerald, comme descendants du célèbre jockey noir de la série de photos animée The horse in motion de 1878, qui est une étape importante des débuts de l’histoire du cinéma, Peele enfonce le clou de l’idée que les noirs font partie de l’histoire culturelle des Etats-Unis, le message est limpide.
Une réalisation singulière
Nope est un film qui dénote des blockbusters habituels dans sa forme. En y insufflant du western, de la comédie, de l’horrifique mais également une ambiance parfois crépusculaire mélangée à un humour qui fait mouche à chaque coup, Peele ne réchauffe pas les vieilles recettes mais tente et expérimente avec talent et une réussite évidente.
Tout cet aspect « décalé » est parfaitement servi par un casting impeccable, avec en première ligne Daniel Kaluuya, le séquestré malheureux de Get Out et vu également dans Les Veuves et Black Panther, Keke Palmer incarne une Emerald pétillante et impétueuse à la perfection, Steven Yeun, échappé des séries The Walking Dead et Invicible livre une prestation que Tim Burton n’aurait pas boudée pour son Mars Attack, quant au vétéran canadien Michael Wincott, il campe un chasseur d’images old school qui rappelle au spectateur que parfois, ne pas dépendre de la technologie, peut servir.
Bien sûr, Nope est une œuvre singulière qui ne séduira pas forcément tous les spectateurs et se verra probablement qualifiée d’arnaque ou de « nanar » par les puristes du genre mais l’époque avance, le cinéma évolue et ce nouveau long-métrage de Jordan Peele s’inscrit dans cette mouvance et préfigure probablement le blockbuster du futur.
Il va falloir s’y faire.
Sortie : Le 10 août 2022 – Durée : 2h10 – Réal. : Jordan Peele – Avec : Daniel Kuluuya, Keke Palmer, Steven Yeun… – Genre : Horrifique – Nationalité : Américaine
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