Avec 200 heures de témoignages audio et de sublimes archives colorisées, le réalisateur britannique James Erskine fait revivre la légende du jazz, Billie Holiday.

Par Marc Godin

A l’origine de ce merveilleux documentaire sur la chanteuse Billie Holiday, une biographie avortée d’une journaliste, Linda Lipnack Kuehl, qui enregistre dans les années 70 les témoignages de pointures du jazz comme Charles Mingus, Count Basie, Tony Bennett, mais aussi la cousine de Lady Day, ses avocats, ses amants, des proxénètes… « J’avais entendu parler du « mystère » Linda Lipnack Kuehl sur des sites de fans, assure le réalisateur britannique James Erskine. Cette journaliste avait tenté d’écrire une biographie sur Billie, elle était morte mystérieusement et ses cassettes audio d’interviews avaient disparu. Je n’avais aucune idée si les bandes elles-mêmes existaient vraiment, encore moins où elles se trouvaient… »

Son producteur, Barry Clark-Ewers, parvient à localiser et retrouver le trésor : 125 bandes audio, deux cents heures d’interviews, ainsi que le manuscrit non publié de Linda. James Erskine peut réaliser son rêve, un doc sur la légendaire Billie Holyday.

Si certaines de ces cassettes sont désagrégées, d’autres à peine compréhensibles, beaucoup vont se révéler des perles rares. « Nous avons commencé le processus de transfert numérique des bandes avec un génie en Belgique qui a réussi déterrer des voix absolument inaudibles, comme celle de Count Basie. Un travail de magicien qui a pris un an et demi. »

Un chemin de croix

Avec cette polyphonie de témoignages, on suit l’enfance terrible de Billie, ses tournées dans le Sud où elle rentre par les cuisines pour chanter car l’entrée des hôtels lui est interdite, l’alcool, la poudre, ses liaisons avec des hommes dangereux, la prison, la mort à 44 ans…

Un chemin de croix, entrecoupé de sublimes archives colorisées où elle chante avec son âme. « Je voulais que le film soit structuré autour des performances de cette sublime chanteuse. Notre équipe de chercheurs s’est mise en quête des meilleures archives dans le monde entier. Une cinquantaine de ses chansons ont été filmées, mais beaucoup ont disparu. Nous voulions remonter à la source, si possible, en retrouvant des tirages 16 mm et 35 mm oubliés depuis longtemps. Nous avons mis la main sur une sublime version de God bless the Child au British Film Institute (BFI). Ils ne savaient même pas qu’ils avaient cette merveille dans leur stock car elle était mal référencée. »

« Rien de plus contemporain »

C’est simplement magnifique d’intelligence, d’érudition, d’émotion et voir Billie, en couleurs, interpréter ses standards est un spectacle unique, inoubliable, que l’on soit fan ou non de Lady Day.

Mais il faut également voir ce documentaire car ce qu’il raconte résonne avec ce qui se passe en moment aux USA, avec l’assassinat de George Floyd, le mouvement Black lives matter, le fait que l’on abatte encore et toujours des noirs dans la rue. « Billie est l’histoire d’un génie qui s’est battu avec acharnement contre ceux qui voulaient l’écraser pour avoir osé chanter la vérité. Il n’y a rien de plus fort, de plus contemporain. »

Sortie : 30 septembre 2020 – Durée : 1h 32 – Réal. : James Erskine – Genre : Documentaire – Nationalité : Britannique – Distribution : L’Atelier Distribution

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