Par Marc Godin

En voie d’extinction définitive, de grosses bestioles pleines de dents mettent le souk aux Etats-Unis. Un cinquième volet ciselé par un prodige de la mise en scène, mais coulé par un script bas de plafond.

Les producteurs du nouveau Jurassic World ont eu UNE bonne idée, et une seule : embaucher le virtuose espagnol Juan Antonio Bayona pour la mise en scène. Car Bayona est un petit génie, le fils spirituel de Steven Spielberg, un redoutable formaliste, doublé d’un excellent raconteur d’histoires. Au fil des années, il a signé des merveilles comme L’Orphelinat (2007), produit par Guillermo Del Toro, le très inspiré Quelques minutes après minuit (2016) et son chef-d’œuvre, The Impossible (2012), insoutenable survival qui se déroule lors du tsunami de 2004 en Asie du Sud Est.

Epaulé par les meilleurs techniciens et doté d’une technologie sans limite, Bayona est le réalisateur parfait pour signer la suite d’un classique de Spielberg. Le problème, c’est que les comptables d’Hollywood lui ont filé des millions mais lui ont demandé de mettre en image un script débile, interdit aux plus de 10 ans, comme si tu embauchais Lewis Hamilton pour piloter une voiture à pédales !

Trois ans après la catastrophe du parc Jurassic World (les bestioles pleines de dents ont boulotté une nouvelle fois les visiteurs), l’île d’Isla Nublar est menacée par un volcan et les animaux préhistoriques sont voués à une extinction définitive.

Ancienne executive woman obsédée par le pognon, Claire bosse maintenant dans une start-up cool : elle boit des cafés latte macchiato et pianote frénétiquement sur son iPhone. Quant à Owen, il construit une cabane en bois, boit des bières et joue au billard. Très vite, les deux tourtereaux sont de retour sur l’île pour une mission de sauvetage. Mais ils ne sont pas les seuls et ils se font doubler par des méchants chasseurs et de très méchants-méchants capitalistes qui ont décidé de transformer les dinos en armes fatales et de vendre un dino génétiquement modifié, l’Indoraptor, à des milliardaires russes barbus et grimaçants.

Des personnages bâclés

Laborieux, prévisible, mal écrit, le scénario du cinquième volet de la saga Jurassic est une catastrophe industrielle, du ciné conçu par des algorithmes mous du bulbe. Quand en 1993 Spielberg bosse sur Jurassic Park, il engage Michael Crichton, l’auteur du roman, maintenant décédé, et David Koepp, un scénariste capable de pondre L’Impasse de Brian de Palma, le premier Mission : impossible (toujours De Palma), Panic Room ou La Guerre des mondes de Spielberg.

Ici, c’est le duo de tocards Derek Connolly-Colin Trevorrow, déjà coupable du précédent opus, qui s’y colle. Les personnages sont bâclés (mention spéciale aux deux héros insipides), la double intrigue (le sauvetage sur l’île et l’arrivée des animaux préhistoriques aux USA) est paresseuse, la narration a la densité d’une crème fouettée, alors les deux scribouillards font les malins et pour meubler le vide, tentent quelques réflexions sur la science qui va trop loin, la souffrance des animaux ou cette humanité qui a condamné une grande partie des animaux à l’extinction. Bobo la tête !

Quelques moments de pur cinéma

Malgré des péripéties aussi palpitantes qu’une coloscopie de stégosaure, Juan Antonio Bayona parvient à ciseler quelques moments de pur cinéma. La disparition d’un brachiosaure dans la lave et les cendres, les griffes d’un dino/croquemitaine qui s’approchent au ralenti dans le dos d’une fillette, une scène de cauchemar dans une chambre d’enfant…

Bayona a du talent et il a eu la bonne idée de s’entourer de ses fidèles, dont Oscar Faura, le chef op, ou Bernat Vilaplana, son monteur. Certaines séquences sont sublimement réalisées, il y a du souffle, parfois, mais cela ne suffit pas à faire un film… A l’arrivée, Juan Antonio Bayona n’est qu’une belle signature.

Une belle signature sur du PQ.

Sortie : 6 juin 2018 – Durée : 2 h 08 – Réal. : Juan Antonio Bayona – Avec : Chris Pratt, Bryce Dallas Howard, Rafe Spall… – Genre : aventure – Nationalité : Américain

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