Par Jean-Pascal Grosso

John Rambo revient pour un ultime opus. Ça fait très mal. Et pas forcément de bien sur un plan cinématographique.

Le public avait laissé John Rambo, revenu de ses rizières, dans un quatrième épisode réussi. C’était il y a onze ans exactement. La coda prétendue des aventures du super-guerrier à bandeau dans les cheveux flirtait avec le baroud à la Jack Cardiff et la moiteur sale des jungles de cauchemar de Ruggero Deodato. Après avoir remis sur orbite le personnage-clé de Rocky Balboa (un Golden Globe pour Creed en 2016), l’insatiable Sylvester est allé remettre une pièce dans la machine du « C’était pas ma guerre ! » qui aura, elle aussi, pavé le sentier de sa gloire.

Cette fois donc, rentré dans ses pénates US, l’ex-bérêt vert s’est mué en cowboy vieillissant, dresseur de chevaux sauvages, père de substitution pour une gamine modèle, Gabrielle (ado bien interprétée par Yvette Monreal, 27 ans au compteur). Kidnappée au Mexique, elle est droguée, forcée à se prostituer.

Tonton Rambo tente de la libérer mais se fait laminer par un gang beaucoup moins affable qu’une tablée pour réclame de chips Old El Paso. Ensuite, il se venge. Et ça saigne énormément.

En pleine tourmente politique, l’Amérique « progressiste » (mais pas que) a hissé tout de go le drapeau rouge de la « haine » dès la sortie des premières séances de presse ; la nausée au bord des lèvres. Stallone se frottant aux cartels mexicains, les orfraies ont crié au film raciste, pire encore « trumpiste ». C’est aller vite en besogne façon Thuram.

Difficilement regardable pour son sadisme omniprésent (en ouverture, une séance de torture qui laisse loin derrière les fantaisies dentaires de Marathon Man), Rambo Last Blood tient surtout de l’exercice de destruction massive tel un jeu vidéo obscène. Pour ce qui est du discours politique, il est bien maigre. Certes, le monde ne semble plus exister que séparé par un mur très fragile et détourné à souhait.

Au-delà, le chaos règne invariablement. Le Mexique présenté ici se limite aux gangs ultra-violents, aux flics corrompus et à un bordel crasseux. On est loin des chromos du Yucatán pour adorateurs de selfies exotiques. Après quelques péripéties dont une attaque de clapier clandestin au marteau (!) et une scène d’émotion crédible, Stallone/Rambo revient à ce qu’il sait faire de mieux : le massacre à fond les manettes. Sous influence « porno-violente » aujourd’hui. Car il y a un peu de Saw dans tout ça. Dans les têtes tranchées, les crânes défoncés, les membres coupés.

Après avoir policé son personnage de boxeur sensible, à en faire oublier ces catastrophes industrielles que furent Rocky III, IV et V, Sylvester Stallone, 73 ans, refile la mise en scène de Rambo à Adrian Grunberg, sorte de sous-S. Craig Zahler, déjà responsable de Kill the Gringo avec Mel Gibson. En résulte un magistral haché de viandes humaines. Affreux, sale, méchant. Et assez con sur la fin. David Morell, père littéraire de Rambo, en a pleuré médiatiquement des larmes de sang. De là à penser que Stallone, finaude superstar, a voulu saborder l’une de ses deux franchises cinématographiques adorées, il n’y a pas loin. Quand le héros est fatigué, autant le faire chuter. Sciemment.

Sortie : 25 septembre 2019 – Durée : 1h40 – Réal. : Adrian Grunberg – Avec : Sylvester Stallone, Paz Vega, Sergio Peris-Mancheta… – Genre : action – Nationalité : Américaine

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