Dark Waters
Par Marc Godin
Le combat épique d’un avocat, incarné par Mark Ruffalo, seul contre un géant de l’industrie chimique. Un thriller écolo, voire horrifique, signé Todd Haynes.
Nous sommes en Virginie, dans un bled paumé, sous un ciel couleur pluie, couleur mort, où agonisent des vaches agressives, atteintes de malformations. Mais les hommes aussi semblent malades et portent de terribles stigmates. Est-ce un remake de Contagion ou un nouvel épisode de Walking Dead ?
Non, simplement un film ultra-réaliste, inspiré de faits véridiques et d’une série d’articles du New York Times sur Robert Bilott, avocat d’une grande firme de Cincinnati. Défenseur de sociétés de l’industrie chimique et agricole, il découvre bientôt que la toute puissante société DuPont (abréviation de DuPont de Neumours) déverse dans une rivière, et ce depuis 40 ans, des déchets hautement toxiques de C8, dérivé du fluor utilisé dans le revêtement des poêles en Teflon. Et donc pollue les nappes phréatiques qui provoquent des cancers aux animaux et aux habitants des alentours.
Incrédule, Bilott commence à enquêter, avant de se métamorphoser en lanceur d’alerte et d’affronter DuPont dans un combat inégal, titanesque, qui dura 17 ans, seul contre tous, subissant les menaces et les pressions de la multinationale dont les bénéfices atteignent un milliard de dollars par an. Un aller simple vers l’enfer…
Le rêve US métamorphosé en cauchemar
Comme dans l’excellent Révélations de Michal Mann, Erin Brockovich de Steven Soderbergh ou Promised Land de Gus Van Sant, Dark Waters lève le voile sur les arrière-cuisines du rêve américain qui s’est métamorphosé en cauchemar.
C’est du cinéma carré, entre thriller parano et film de procès, porté par un magnifique Mark Ruffalo, lesté d’une vingtaine de kilos en plus, qui a produit ce film élégiaque et fait engager le réalisateur Todd Haynes. Un choix étonnant puisque Haynes est le spécialiste des grands mélos flamboyants comme Carol ou Loin du paradis. Pourtant, Todd Haynes fait plus que le job. Grâce à la photo glaciale d’Edward Lachman, son chef op’ fétiche, il tourne sous un ciel sans soleil, dans des paysages lunaires, comme après une Troisième Guerre mondiale.
Un style vénéneux qui flirte même avec l’horreur quand Haynes filme des ados qui se baignent la nuit dans une eau contaminée. Plus le film avance, plus le spectateur se recroqueville, terrifié par cet environnement toxique et ces firmes obsédées par le profit qui n’hésitent pas à sacrifier des populations déjà misérables, dans une impitoyable guerre des classes où les plus pauvres n’ont plus leur place.
Et l’on comprend que la contamination est massive, systémique, induite par une société obsédée par l’avidité et le profit, cette Amérique de Trump, ce monde qui crève de l’ultralibéralisme.
Notre monde.
Sortie : 26 février 2020 – Durée : 2h08 – Réal. : Todd Haynes – Avec : Mark Ruffalo, Anne Hattaway, Tim Robbins… – Genre : biopic – Nationalité : Américaine
Incrédule, Bilott commence à enquêter, avant de se métamorphoser en lanceur d’alerte et d’affronter DuPont dans un combat inégal, titanesque, qui dura 17 ans, seul contre tous, subissant les menaces et les pressions de la multinationale dont les bénéfices atteignent un milliard de dollars par an. Un aller simple vers l’enfer… Le rêve US métamorphosé […]