Ça Chapitre 2
Par Marc Godin
Le clown aux dents longues est de retour à Derry et affronte le club des Losers. Ou comment transformer un excellent film d’horreur en une suite aussi stupide qu’interminable.
Le problème de ça Chapitre 2 résulte de la conception même de l’original, grand récit d’apprentissage et excellent film d’horreur. Les scénaristes Cary Fukunaga, Chase Palmer et Gary Dauberman avaient alors séparé les temporalités imbriquées du roman de Stephen King, dont la narration passait en virtuose d’une époque à l’autre, faisant dialoguer les temporalités, le paradis perdu de l’enfance et le présent cauchemardesque des sept héros, alors que le film se concentrait exclusivement sur l’enfance des personnages.
Ce Chapitre 2 se déroule 27 ans plus tard, avec des héros quadras, fatigués, voire traumatisés dans les grandes largeurs. Et s’apparente à un remake asthmatique et interminable du premier. Les personnages ressemblent de très loin à leurs modèles et revivent quasiment les mêmes péripéties horrifiques, les mêmes tortures, avec en bonus des monstres en images de synthèse bien crados.
Le plus flippant ? La bêtise du scénario
Pas de suspense, ce Chapitre 2 est donc une catastrophe, un accident industriel, trois heures de vide. Responsable du massacre, Gary Dauberman (qui porte bien son nom), scribouillard pathétique des Annabelle ou La Nonne. Il bâcle les personnages, ce qui est un comble quand on voit la finesse dans l’écriture des trois héros du précédent, étire les situations, fait de la psychanalyse à deux balles, recopie des séquences entières de l’original et en désespoir de cause, refait intervenir les mômes dans une série de séquences qui semblent des prises ratées ou coupées du premier chapitre… De fait, le truc le plus flippant de ça Chapitre 2, c’est la bêtise de son scénario.
Fucking clown
L’autre gros problème, c’est la mise en scène. Sur ça, l’Argentin Andrés Muschietti avait embauché Chung Chung-hoon, le chef opérateur de Park Chan-wook, l’homme qui a illuminé Old Boy ou Mademoiselle, et qui ciselait une image mordorée, charnelle, entre le paradis chromo et l’enfer de Gustave Doré.
La première apparition du clown dans la bouche d’égout, c’était lui ! La science de la mise en scène de Muschietti évoquait la générosité et la force d’un Steven Spielberg et il portait l’épouvante à l’incandescence, refusant la plupart du temps le jump scare.
Je me souviens encore de cette scène ahurissante des cheveux qui sortent du lavabo et du sang qui asperge la salle de bain de Bev. Et un des monstres du film, la femme à la flûte, semblait s’échapper d’un tableau de Modigliani. Ici, tout est terne, moche et parfois franchement grotesque (je pense à la séquence du début dans le resto chinois).
Après une scène d’ouverture plutôt réussie (le cinéaste Xavier Dolan se fait lyncher, dans un déluge de violence et de coups, bruités comme dans Rocky 28), Muschietti perd toute inspiration et fait dans le téléfilm miteux. C’est aussi excitant qu’une chaude-pisse ou que de regarder son papier peint : les acteurs en roue libre balancent des vannes pas drôles et le réalisateur peine à faire naître l’angoisse ou la peur, pas vraiment aidé par les effets spéciaux au-delà du raté. Bizarrement, il semble plus intéressé à multiplier les plans de cavernes sombres et humides qui ressemblent à des cavités utérines ou à des vagins munis de centaines de dents… Etonnant, non ?
A l’arrivée, ça Chapitre 2 est un long chemin de croix et si tu as plus de 12 ans, tu te recroquevilles très vite dans ton fauteuil, égrenant les secondes qui te rapprochent de la délivrance. Si le film est une cruelle déception, il y a quand même un truc qui fout vraiment les jetons : et si la Warner mettait en chantier un Chapitre 3 ?
Sortie : 11 septembre 2019 – Durée : 2h50 – Réal. : Abdy Muschietti – Avec : Bill Skarsgard, James McAvoy, Jessica Chastain… – Genre : horreur – Nationalité : Américaine
Le plus flippant ? La bêtise du scénario Pas de suspense, ce Chapitre 2 est donc une catastrophe, un accident industriel, trois heures de vide. Responsable du massacre, Gary Dauberman (qui porte bien son nom), scribouillard pathétique des Annabelle ou La Nonne. Il bâcle les personnages, ce qui est un comble quand on voit la finesse […]